Le rôle de la religion dans la promotion de la condition féminine

Statements

Le rôle de la religion dans la promotion de la condition féminine

Présentée à la quatrième Conférence mondiale des Nations Unies sur les femmes

Beijing, Chine—13 September 1995

Plan courageux et audacieux pour promouvoir à la fois la condition des hommes et des femmes, le Programme d'action de la Quatrième Conférence mondiale sur les femmes repose sur des fondements solides. Il établit un calendrier pour l'égalité qui met l'accent sur les droits des femmes en tant que droits humains, souligne la responsabilité partagée et le partenariat entre femmes et hommes, et en appelle à l'action immédiate en vue de créer un monde juste, développé et pacifique, fondé sur le principe de l'égalité et édifié sur le savoir, l'énergie, la créativité et les talents de la femme. C'est donc d'un point de vue moral et de principe, loin du pragmatisme pur et dur, que le Programme d'action aborde l'émancipation des femmes.

La Communauté internationale baha'ie s'en félicite, mais estime qu'il convient d'aller beaucoup plus loin encore. Pour que le Programme d'action bénéficie du soutien mondial nécessaire à la réussite de son application, le principe sur lequel il se fonde, soit l'égalité des hommes et des femmes, doit être considéré comme un aspect essentiel d'un principe plus large encore: l'unité de l'humanité. Justement replacée dans le contexte de cette unité, l'égalité des sexes doit être comprise non seulement comme une exigence de justice mais comme une condition sine qua non de la paix et de la prospérité. Rien de moins qu'une vision exigeante de la paix et un attachement résolu aux valeurs sur lesquelles elle doit se fonder, elle aura le pouvoir de susciter dans le comportement des individus, au sein des structures administratives, et au niveau de la dynamique interpersonnelle, les changements révolutionnaires requis par le Programme d'action.

Traditionnellement, les religions ont été parmi les plus puissantes sources de vision d'avenir et de valeurs. Toutes, surtout à leurs débuts, ont esquissé un nouveau dessein pour la société, exprimé des valeurs conformes à ce dessein, et inspiré la transformation tant des individus que des institutions.

Parallèlement, il convient de reconnaître qu'elles ont aussi été source de division et de fragmentation sociale. En effet, l'émancipation des femmes n'a pas toujours été l'une de leurs préoccupations majeures, et lorsqu'elle l'a été, a connu des degrés divers de réussite. Si, d'une façon générale, les religions ont eu tendance, dans les premières années de leur existence, à encourager la participation des femmes, l'histoire montre qu'avec le temps un mouvement s'est dessiné au sein des institutions religieuses qui a conduit à l'émergence de pratiques et de comportements propres à faire obstacle au développement du potentiel des femmes.

La religion étant potentiellement une force considérable de progrès, il est instamment demandé aux chefs religieux et aux hommes de foi de se lever par amour pour l'humanité afin de promouvoir ces principes unificateurs éternels - ou valeurs spirituelles - propres à insuffler tant aux individus qu'aux gouvernements la volonté de mettre en  œuvre le calendrier pour l'égalité.

Il y a en premier lieu, le principe de l'unité de l'humanité. Il est au cœur même du principe moral selon lequel il nous faut traiter autrui comme nous aimerions être traités nous-mêmes, norme éthique soutenue sous une forme ou une autre par toutes les religions. Afin d'instaurer la justice, la paix et l'ordre dans un monde interdépendant, ce principe doit inspirer toutes les relations, y compris entre hommes et femmes. Si l'on devait examiner la façon dont les femmes sont traitées à la lumière de cette norme éthique, nombre de pratiques culturelles, religieuses et traditionnelles seraient sans aucun doute largement dépassées.

La transformation personnelle nécessaire à une véritable égalité sera, à n'en pas douter pénible à réaliser tant pour les hommes que pour les femmes. Tous deux devront cesser de s'enferrer dans la culpabilisation et le blâme, afin d'assumer courageusement la part de responsabilité qui leur revient dans la transformation de leur société. Les hommes doivent user de leur influence, en particulier dans les organisations civiles, politiques et religieuses dont ils ont le contrôle, pour y faire entrer systématiquement les femmes, non par condescendance ni par un soi-disant esprit de sacrifice mais parce qu'ils sont convaincus que la société ne peut progresser sans leur apport. Les femmes, de leur côté, doivent s'instruire et aller de l'avant dans tous les domaines de l'activité humaine, mettant ainsi leurs qualités, leurs talents et leur expérience propres au service de l'équation politique, économique et sociale. Femmes et hommes assureront ainsi ensemble la paix mondiale et le développement durable de la planète.

Il incombe aux chefs religieux et aux hommes de foi, où qu'ils se trouvent, d'assumer une responsabilité toute particulière: celle de réaffirmer les principes spirituels éternels qui unissent et relient les cœurs ensemble et libèrent les facultés de l'âme. Portés par l'esprit et la perspective de l'unité de la famille humaine, femmes et hommes sont en mesure de créer, ensemble et dans conformément du calendrier pour l'égalité, un monde pacifique, juste et prospère, propice à l'éducation et à l'épanouissement des générations futures.